À l’encre violette est un livre choral comme Mireille Barbieri en a la manière et le secret. C’est une pièce de bois qui se tourne, révèle sa matière et ses facettes, anoblit son lecteur par la force transmise. Les destinées de ses caractères – car ils sont plus que des « personnages » – tracent des cernes puissantes comme autant de chemins dans l’épaisseur du vivant. de l’Italie à la nouvelle Amérique, ils nous conduisent à cette lucidité vibrante que révèle le panorama entrevu au soir d’une vie. Tout cela mû par l’énergie fiévreuse du désir. L’énergie mécanique du voyage en train, puis en bateau, mastodontes d’acier qui labourent les paysages avec, à leur bord, les fragiles migrants. L’énergie des idéaux défendus, perdus. Celle des sentiments bafoués, portés malgré tout. le fil violet du récit coud tous ces mondes et de cette tension se nourrit sa puissance – de l’espace entre ces vies, de ce que l’auteur noue et dénoue puis resserre. Un texte simplement vivant, inspiré, limpide, dressé dans une apaisante humilité.
Philippetto – 9 février 2019